Le site qui présente et fait revivre notre patrimoine automobile, principalement avant guerre et de marques françaises aujourd'hui disparues! (Lorraine Dietrich, Voisin, Salmson, Georges Irat, Delage, etc…). Venez redécouvrir ces autos exclusives, sportives et ces cyclecars…! ;)
voici une belle Lorraine Dietrich B 3/6 avec une carrosserie originale, un coach 4 places ou, plutôt, un « faux-cabriolet » sur un châssis court.
Malheureusement, je ne sais pas qui est le carrossier…
(n° de châssis: 122467)
Elle est de 1923 et son actuel propriétaire l’a complètement restaurée (c’était une « sortie de grange ») dans les années ’80. Je le remercie d’avoir accepté de m’envoyer ses photos 😉
Voici d’ailleurs à quoi elle ressemblait quand il l’a trouvée (ce qui permet de se rendre compte du travail accompli):
1923 est évidemment l’année de la première course des 24 heures du Mans à laquelle Lorraine Dietrich participa avec 3 voitures sorties, au hasard, de la chaîne de fabrication (mais des modèles « Sport »).
La première finit 8°, la seconde 19°, la dernière ayant dû abandonner.
Enfin, on peut remarquer que sa mascotte de radiateur n’est pas le fameux lévrier de C. Brau mais un oiseau.
Pour info, elle est à vendre son nouveau propriétaire a des liens étroits avec la marque, l’usine d’Argenteuil et est passionné par sa ses productions… 😉
voici encore un document déniché sur le site Gallica de la BNF. (Sur la 1ère page, c’est un tableau de Willems qui représente Théry (en Brasier) et Lancia (en FIAT) en plein virage.
J’ai d’abord été attiré par la superbe mise en page qui fait tourner la tête est particulièrement dynamique dans ses virages…!
Et pendant la lecture, je me suis délecté des détails de l’époque (1906, j’aime bien le conseil de ralentir au frein à main, par exemple…
Il ne faut pas oublier qu’en général le frein à pied freine la transmission, que le frein à main s’occupe des roues arrières et que, évidemment, il n’y a pas de freins à l’avant en ce temps là!) et des photos particulièrement réussie.
Le texte est signé Charles Faroux (1872-1957), passionné d’automobiles et de sport depuis les premières heures, journaliste à La Vie Au Grand Air, La Vie Automobile et Très Sport mais surtout, quelques années après, à l’originedu fameux « Grand Prix d’Endurance de 24 heures / Coupe Rudge-Whitworth », c’est à dire des 24 Heures du Mans dès 1923.
Il dirigera cette course jusqu’en 1956.
Pour ce qui est du pilote d’essai, Paul Faure, dit « le gros » dans l’article, je n’ai rien trouvé sur lui 🙁
Et pour la voiture d’essai, rien n’est précisé mais je pense que ça peut être une FIAT (ou une ITALA)…
Et maintenant, bonne lecture 🙂
L’ART DE PRENDRE LES VIRAGES
Le conducteur le meilleur est celui qui prend le virage à la plus grande vitesse compatible avec les limites de résistance sans augmenter le danger. En pareille matières, rien ne saurait suppléer à une longue pratique.
Tous ceux qui ont assisté au passionnant spectacle d’une grande épreuve d’automobiles sur route ont saisi d’instinct l’immense importance qu’a, pour le coefficient personnel de chaque conducteur, sa manière propre de prendre les virages. Mais nos lecteurs se sont-ils préoccupés d’estimer par quel gain de temps peut se traduire la supériorité d’habileté ? Peut-être que non. Or, il est permis d’affirmer que sur un virage à angle droit raccordant deux alignements, un homme comme Lancia peut prendre jusqu’à six ou sept secondes à un conducteur moyen, et six ou sept secondes à l’allure de course, cela représente deux cents mètres. C’est dans cette merveilleuse virtuosité du grand conducteur italien qu’il faut trouver la raison essentielle de sa brillante marche à la Coupe Gordon Bennett et à la Coupe Vanderbilt. A Brescia, au contraire, où les lignes droites abondent, Lancia se classe en fort bon rang, mais à aucun moment, il ne galope par-dessus le lot. Sa valeur personnelle a moins d’importance.
En dehors des courses, pour le touriste, la manière de virer joue également un grand rôle. Les voitures des types courants sont généralement moins stables et le renversement peut être à craindre. Quand le virage est pris suivant les bonnes règles, on passe à la même vitesse en diminuant le danger, ou bien on passe plus vite sans courir un plus grand risque.
J’ajoute d’ailleurs que, même en dehors de l’extrême danger, il importe de virer au mieux pour diminuer dans des proportions appréciables la fatigue, par conséquent l’usure des bandages.
Comment doit-on virer. Il n’est pet t-être pas superflu de dire, en manière de préliminaire, que tout ce qu’on va lire ne s’adresse nullement aux chauffeurs pratiquants. Tous ceux qui ont roulé à allure un peu vive ont dû, soit d’instinct, soit par réflexion, soit à la suite d’accidents, respecter les règles. Je n’ai d’autre prétention que de rappeler ces dernières :
Quand une automobile parcourt une courbe, elle est dans le sens transversal, sollicitée par la force centrifuge. Celle-ci est proportionnelle à la masse du véhicule, au carré de la vitesse et inversement proportionnelle au rayon. Son point d’application est le centre de gravité: par suite, l’effort de renversement sera, à force égale, d’autant plus grand que la voiture sera plus haute. Nous trouvons là, en passant, la raison pour laquelle les voitures du Circuit d’Auvergne -si abondant en virages- étaient assez basses.
Ce que j’ai dit sur la mesure de la force centrifuge montre que pour une voiture déterminée il y a une limite de vitesse pour chaque rayon de virage, et qu’il y a le plus grand intérêt à augmenter le rayon du virage. En outre, il tombe sous le sens que pour un même rayon, la limite de vitesse sera augmentée s’il y a un devers; cette remarque est appliquée dans tous les vélodromes.
Cela dit, et étant admis que les routes sont bombées, nous allons voir comment le conducteur doit faire pour réaliser les meilleures conditions du virage.
Supposons un virage à gauche. On pourrait être tenté d’attaquer le virage en tenant sa gauche sur la route qui le précède, de tourner en conservant la corde et de sortir à gauche. La méthode n’est pas complètement mauvaise, mais elle ne donne pas la meilleure utilisation de vitesse. Il faut attaquer le virage en dehors, pour augmenter le rayon de courbure, se rabattre à la corde pour profiter du dévers, et ne sortir qu’à la corde. On constate en effet qu’il y a un certain danger à sortir trop vite sur le bombement de la route. La voiture serait emmenée à l’extérieur, en dépit des efforts du conducteur.
La Vie au Grand Air a demandé au populaire Paul Faure de bien vouloir poser pour les photographies qui illustrent cet article. Il n’était guère possible de faire un meilleur choix. « Le Gros », comme on l’appelle dans les milieux automobiles, est un vireur d’une audace et d’une habileté incroyables et je le considère comme un des meilleurs conducteurs français. Il est d’ailleurs assez probable, sinon certain, qu’il va revenir aux grandes épreuves et la voiture qu’il montera aura, de ce fait, une bonne chance.
Cette série de photographies montre comment le conducteur doit virer en course. C’est d’abord le commencement de l’attaque: la voiture a quitté le milieu de la route et se présente à l’extérieur, puis elle se rabat peu à peu à la corde qu’elle tient serrée. A la sortie, la voiture est encore à la corde, l’arrière un peu déporté. Les conducteurs adroits savent effet profiter d’un léger dérapage pour augmenter la vitesse de passage.
Quelques mètres plus loin, tout est remis dans l’ordre ; la voiture file dans une rectitude parfaite.
A noter également au milieu du virage l’écrasement des pneus et des ressorts extérieurs, la détente au contraire des mêmes organes placés à l’intérieur.
Je mentionne que la difficulté du virage est sensiblement augmentée quand, ainsi que c’était le cas pour les Darracq 1905, la voiture n’a pas de mécanisme différentiel. On s’en tire à force d’audace et d’adresse. Hémery et Wagner sont passés maîtres dans cette acrobatie spéciale.
Les mauvais virages. Mais supposons un virage mal pris sur le dévers, soit à trop grande vitesse, soit enfin suivant une courbe dont les rayons successifs ne varient pas très insensiblement. Les suites sont toujours désastreuses. Ou la voiture est surbaissée, et le tête à queue peut survenir après un dérapage important: les conséquences ne seront très graves que si dans son mouvement la voiture rencontre un obstacle; ou cette voiture est assez haute, et alors c’est le renversement, qui peut avoir des suites très sérieuses.
Les règles données plus haut ne doivent être appliquées qu’en course, quand on veut gagner le plus de temps possible. Un touriste doit être beaucoup plus prudent. Dans un virage à gauche, il doit ralentir sensiblement, puisqu’il doit garder sa droite et être par conséquent sur le dévers.
Faut-il débrayer dans un virage ?
Non, je ne le pense pas, encore que la question soit assez controversée. De même, un coureur qui couperait l’admission ou l’allumage pendant toute la longueur d’un virage ferait preuve d’une prudence exagérée. Il faut attaquer à l’allure convenable, et aussitôt les roues braquées, utiliser la puissance du moteur.
Conclusion En somme, ces règles sont plutôt inspirées par l’instinct; la théorie les confirme, les explique, mais rien ne saurait remplacer ce qui caractérise les grands conducteurs : l’exacte appréciation des distance, la connaissance précise de la vitesse à laquelle on marche et ce quelque chose d’intraduisible qui fait que le conducteur sent la limite exacte des résistances.
Faute de tout cela, on s’expose à l’accident. Demandez plutôt à mon camarade Paul Sencier. Il vous dira comment le signataire de ces lignes, ayant dépassé la limite de vitesse imposée par un virage, a bien failli se « fausser ». Fort heureusement, -il y a une providence pour les imprudents- on s’en est tiré avec dérapages, tête à queue, zigzags, etc.
Tout en observant ces règles générales, on peut dire que chaque conducteur a sa façon de virer. La manière de Théry n’est pas celle de Le Blon. et le coup de volant de Duray ne ressemble pas à celui de Lancia. Et puis il y a les imprudents! Quand nous parcourûmes, il y a quelques semaines, l’itinéraire du circuit de Fontainebleau, proposé pour le Grand Prix de l’A. C. F., nous nous trouvâmes en face d’un virage un peu sec, même pour d’honnêtes touristes. Et ce fut un cri unanime : « Voilà un virage pour X… ». Ici le nom d’un de nos plus sympathiques conducteurs, que l’on ne reverra peut-être plus en course et dont la dernière épreuve se termina dans un arbre.
On a donné dans différents music-halls des cinématographies de la Coupe au Taunus et en Auvergne. Mieux peut-être que la course elle-même, les films pris dans un virage donnaient cette impression d’angoisse que l’on ressent au passage des concurrents et qui est faite de la crainte de les voir manquer leur virage et venir s’écraser sur le talus d’en face. C’est celle qu’exprime le tableau de Willems dont nous donnons en première page une reproduction.
C’est au dernier Rétromobile, dans la fabuleuse collection de « Julia » que l’on pouvait découvrir cette unique Aston Martin 1500 cm³ de 1930 (châssis n° s 44).
Il s’agit d’une Aston Martin « International », c’est à dire qu’elle est issue de la 1 ½ Litres (gamme sortie en 1928) mais sur un châssis surbaissé et un moteur à carter sec (4 cylindres, 1495 cc, arbre à cames en tête, 56 CV à 4200 trs/mn pour un poids de 991 kg permettant une vitesse en pointe de 130 km/h, boite 4 vitesses).
Sa carrosserie est un « Fixed Head Coupe » (en France, on dirait « Faux Cabriolet ») par E.Bertelli, basée sur un châssis court. Pour la petite histoire, la carrosserie E. Bertelli appartenait à Enrico, dit « Harry » Bertelli, le propre frère de « Bert » (ou « AC ») Bertelli (de son vrai nom Augustus Cesare Bertelli), directeur d’Aston Martin!
L’atelier de carrosserie étant à côté de l’usine, l’entreprise à carrossé la plupart des modèles de cette époque, principalement en Tourer, tous très bien finis. Ce Coupé était une commande spéciale pour un riche armateur, WS Headlam.
et voici à quoi devrait ressembler son moteur
(ici sur une autre « International » châssis court de 1930, la n° s 50)
Pour finir trop rapidement sur les 1,5 Litres, on peut rappeler qu’en 1932 sortiront les « new » International, c’est à dire la série 2 qui se distingue, esthétiquement, par sa calandre en V puis les fameuses « Le Mans » en fin de la même année, la troisième série arrivant à partir de 1934.
En parallèle, il y eut, évidemment, les « Team Cars » (les LM) qui participèrent à de nombreuses courses dont les 24 heures du Mans et de rares « Ulster » (reconnaissables à leur cul « Boat Tail »). Bien que la plupart aient été carrossées en Tourer (2 ou 4 places), il y eut quelques sublimes « Sport Saloon ».
En 1936, les moteurs passeront à 2 litres (et les ailes avant ne tourneront plus avec les roues comme la plupart des modèles précédents) avec les « 15/98 ».
En tout, la production des 1500 cc, de 1927 à 1936 sera d’environ 380 exemplaires, déclinée en 3 séries (Série I de 1927 à 1932, Série II de 1932 à 1934 et Série III ou Mark II de 1934 à 1936).
Et oui, Aston Martin a eu une vie avant David Brown et ses fameuses DB… 🙂
et hop, encore un article sur cette fabuleuse auto qu’est la FIAT S76 des records de 1911… 🙂 (conçu pour battre le record du monde de vitesse, détenu par la « Blitzen-Benz ».)
C’est lors du dernier Rétromobile que j’ai pu la découvrir « en vrai », et, le moins que l’on puisse dire, c’est qu’elle tient ses promesses pour le côté impressionnant et bruyant!
A l’arrêt, déjà, son énorme moteur (issu d’un moteur de dirigeable) arrive quasiment à 1.5 m de haut alors qu’elle mesure 3,75 m de long pour 1,3 m de large… Cette auto n’est quasiment qu’un « moteur sur roue » !
Et quel moteur!
Un 4 cylindres bi-bloc (2 fois 2 cylindres) de 28353 cc (alésage/course de 190 x 250 mm) et, chose rare à cette époque, 4 soupapes par cylindre, 3 bougies/cylindre, magnéto à basse tension, développant environ 290 cv à 1900 tr/mn… le couple doit être titanesque (d’ailleurs, on voit sur la vidéo ci-dessous qu’elle ne demande qu’à arracher la route à la moindre accélération et que son pilote n’a pas la tâche facile pour la contrôler au milieu de la foule lors de sa démonstration. En tout cas, merci à eux pour ce spectacle!).
La transmission (boite 4 vitesses manuelles) se fait par chaîne, son essieux est rigides avec des ressorts à lames semi-elliptiques à chaque extrémité.
Evidemment, pour freiner un tel monstre, il n’y a pas de frein à l’avant (à pédale sur la transmission et à main sur les roues arrières) comme le veut l’époque! Son poids est 1600 kg à vide.
Quant au bruit, il est inutile de faire un grand discours, voici un échantillon 🙂 :
Et pour les records, malgré ses performances, elle n’en homologuera aucun. Pour commencer, Felice Nazzaro, après un essai, refuse de la piloter, la jugeant trop dangereuse et incontrôlable.
Pietro Bordino passe les 200 km/k à Broocklands mais n’ira pas plus loin après une grosse frayeur sur la plage de Saltburn-by-the-Sea (en 1911).
Un prince russe, Boris Soukhanov, la rachète et lui fait prendre le volant par notre Arthur Duray national. Il atteint 225 km/h à Ostende, pousse une pointe à 290 kml/h à Long Island et bat le record du monde du kilomètre lancé à 217,4 km/h en 1912. Rien ne sera homologué!
Redécouverte en 2003, elle a été reconstruite restaurée, le légende peut revivre…
vidéo:
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Pour les amateurs de « monstres », on pouvait aussi découvrir cette Darracq V8 de 1905 à ce même Rétromobile.
vue à Epoqu’Auto 2015, cette Talbot-Darracq (4 cylindres de 3 litres) a été carrossée en roadster en Australie par Smith et Waddington (Sydney).
Elle était présentée comme étant un type V15 (2940 cc et 14 CV) mais je n’ai pas trouvé d’autres infos sur cette gamme… (est-ce l’équivalent des 12/14, combien y en a-t-il eu de construites, sachant que la marque était en difficulté à cette époque ? ). En parallèle, la marque commercialisait une 8 cylindres.
Pour rappel, Darracq est une marque née française (en 1901 pour l’automobile, elle était très connue pour ses résultats sportifs et était même le 3° constructeur français en 1910) mais elle change de nationalité quand elle est rachetée par sa filiale anglaise en 1913.
C’est cette même filiale qui rachète les marques anglaises Talbot et Sunbeam pour devenir « Sunbeam-Talbot-Darracq » à partir de 1920. Talbot redevient français après le rachat par Anthony Lago en 1935, c’est alors l’ère des Talbot-Lago et, pour la branche anglaise, rachetée par le groupe Rootes, il ne restera plus que le nom Sunbeam…
Voici un article paru dans « La Vie au Grand Air » de 1908. Il relate un de ces « exploits » tant prisés à cette époque et qui servaient à la promotion des automobiles, en démontrant leur utilité et, bien sûr, de publicité pour la voiture qui réussissait son pari, comme ici Lorraine Dietrich.
Il s’agit de la 24 chevaux (immatriculée 860 M 2) de Paul Meyan (journaliste et écrivain qui a fondé et dirigé le journal « La France Automobile » et fervent défenseur de ce nouveau moyen de locomotion. Sa voiture est une Lorraine Dietrich car il était ami, entre autres, avec Eugène de Turckeim!)
Cet exploit consiste en la montée de la côte de La Turbie en partant de Monaco (et donc pas par la route qui servait à la fameuse course de côte Nice – La Turbie qui s’est courue de 1897 jusqu’en 1939), voici les détails dans cet article:
3 KILOMÈTRES 600 EN HUIT HEURES
Grimper à la Turbie, par un chemin muletier présentant comme sol des têtes de rochers et des pentes en escaliers atteignant parfois 20 %, telle est la performance qui vient d’être accomplie par une 24 chevaux.
Derrière la ville de Monaco, et le long du funiculaire, s’ouvre un chemin datant de l’époque des invasions sarrazines et qui conduit, 560 mètres plus haut, au village de la Turbie. Le sol, formé de grosses pierres, de têtes de rochers usés par les eaux qui, depuis des siècles y descendent en cascade à la moindre pluie, n’a jamais été foulé que par les pieds des hommes et le fer des mulets. Jamais une roue ne s’y est aventurée. Qu’on se figure une série de lacets brusques, s’élevant pendant 3 km. 600 le long de la montagne dénudée, larges de 2 mètres dans la plus grande largeur, formés d’une série d’escaliers, dont les marches ont 15 à 20 centimètres de hauteur, et dont la pente moyenne de 16 % atteint jusqu’à 20 % dans certains tournants !
C’est ce chemin que notre confrère Paul Meyan paria, au cours du récent Meeting de Monaco, de faire gravir à une voiture automobile, reconnaissant d’ailleurs que ce serait un tour de force plus difficile peut-être que ceux qu’on a pu exiger des voitures, au cours de raids comme ceux de Pékin-Paris ou de New-York-Paris. Il avait la voiture sous la main. C’était une 24-chevaux Lorraine-Dietrich, double phaéton, à entrées latérales, 3 m. 45 d’empattement et 1 m. 45 de voie. Le mécanicien qui accepta de tenir le volant dans cette difficile entreprise fut Emmanuel Piccolo. C’est, d’ailleurs, un spécialiste de ces genres de tour de force. Déjà, l’an dernier, il avait mené une 24-chevaux Lorraine-Dietrich au sommet du Prarion, dans le massif du Mont-Blanc, au milieu de difficultés sans nombre.
Mais là, la tâche était plus dure encore. Le chemin, en certains endroits, était plus étroit que la voiture. Il fallut donc disposer des planches au-dessus du ravin, pour supporter les roues. Ailleurs, il fallut prévoir des crics pour déporter l’arrière de la voiture, dans des virages où le chemin se repliait littéralement sur lui-même. Enfin, des colliers de fer munis de crampons furent placés autour des roues arrière. Il était bien entendu qu’aucune aide ne devait être donnée à la voiture, et que l’ascension devait se faire par les seuls moyens du bord.
Six jours furent employés aux préparatifs. Tout Monaco était au courant de la tentative, et à l’heure du départ, quoiqu’il ne fût que 8 heures, il y avait déjà foule à l’entrée du chemin de Moneghetti.
Après in passage si resserré entre les maisons, que les chapeaux des roues éraflent le mur de chaque côté, la route se dégage, elle est désormais bordée par un mur à gauche, tandis qu’à droite c’est le vide. Un premier passage sur les madriers, les roues de droite surplombant le ravin et de nouveau la terre ferme. Ferme? pas assez, puisque la voiture est à peine passée que le sol s’effondre; une partie du chemin est descendue dans le précipice, laissant un trou béant. On sera bien forcé de monter jusqu’au bout, puisqu’on ne peut plus revenir en arrière.
Mais la chose n’est pas si facile, mouillées par le brouillard, les pierres sont glissantes. Les crampons patinent sans mordre, laissant fuser une pluie d’étincelles. On arrive, en plaçant des madriers sous les roues, à avancer de quelques mètres, puis on recommence. Piccolo ne se désespère pas. Il essaie d’abord de faire sauter un crampon sur deux, espérant que, plus espacés, les crampons restant mordront mieux dans les interstices des rochers. Peine inutile. Les roues tournent sur place, sans avancer d’un centimètre. On a alors l’idée de remplacer les crampons qui glissent par des câbles. Il faut descendre les chercher à Monaco, les entourer autour des jantes. Bref, il est midi quand on repart. Plus de trois heures ont été passées à cette même place.
La voiture avance par bonds jusqu’au premier virage. Celui-ci est si court que le trottoir, sur la droite, a près de 50 centimètres de hauteur. Il faut élever l’arrière à l’aide des crics, glisser sous la roue des pierres et des madriers, pour pouvoir repartir. On continue, mais les roues ne cessent de patiner. C’est alors qu’on a l’idée de charger l’arrière pour donner de l’adhérence. Quatre paysans grimpent derrière le phaéton et cela marche. Cela marche même si bien que les curieux, qui sont maintenant foule, sont obligés de se mettre à courir pour suivre la voiture.
Chargée de ces sept voyageurs, sous la poussée de ses 24 chevaux, la voiture monte maintenant sans peine. Mais les lacets sont si durs qu’il est absolument impossible de virer. On a beau descendre pour braquer les roues à la main, tout virage est impossible. Il faut alors engager l’avant sur les rochers, porter l’arrière sur la route et continuer à monter en marche arrière jusqu’au prochain tournant, où on recommence la manoeuvre en sens inverse.
Après quelques péripéties de ce genre, le chemin s’engage enfin sous le pont du funiculaire, dont les wagons sont chargés de curieux venus de Monaco pour assister, un peu incrédules. à l’arrivée de la voiture. On débouche enfin sur la place du village, noire de spectateurs. Il est 4 h. 1/4. Les 3 km. 600 ont été gravis en 8 h. 1/4. Equipée sur des cordages à l’arrière et chargée comme elle le fut sur la fin, la voiture aurait pu grimper en trois heures.
C’est une dure épreuve, dont le moteur et le châssis Lorraine-Dietrich sont sortis à leur honneur. Une bonne part du succès revient à l’énergique mécanicien Piccolo, qui, pendant huit heures, a été constamment sur la brèche et soumis à des énervements qui auraient lassé les plus calmes. Félicitons notre confrère Meyan de son audace.
F.-A. WHEEL.
Encore une fois, merci au site Gallica de le BnF où j’ai trouvé le document et les photos.
voici un nouvel article tiré du Génie Civil, celui du 05/12/1925 (elle est sortie l’année précédente) qui décrit le châssis « 10 CV », c’est à dire de la C7:
Voitures françaises. – Châssis Voisin, 10 ch. –
Nous avons déjà longuement décrit dans le Génie Civil (1), les modèles 8 ch, type C4, et 18-22 ch, types C3 et C5, que la Société des Aéroplanes Voisin continue à construire en les dotant de tous les perfectionnements nouveaux. Nous nous bornerons à dire quelques mots du châssis 10 ch, type C7 (fig.17), qui complète la série des Voisin et qui présente d’ailleurs les plus grandes analogies avec les deux châssis précédents.
Le moteur, l’embrayage et le changement de vitesses reposent sur le châssis en trois points, de manière à être insensibles aux déformations de ce dernier. Le moteur est un quatre-cylindres 67 X 110, de 1L550 de cylindrée, sans soupapes, avec culasse amovible. Le vilebrequin, porté par deux paliers, est graissé sous pression; le refroidissement se fait par thermosiphon et l’allumage est assuré par une magnéto à haute tension, à avance variable. L’embrayage est du type à disque unique.
Le changement de vitesses, du type à deux baladeurs, donne trois vitesses avant et une combinaison de marche arrière. Une réglette-jauge, fixée à un bouchon, permet de contrôler la quantité de lubrifiant contenue dans la boîte.
La transmission comporte un seul joint de cardan, avec poussée centrale; le joint de cardan, à noix, est graissé, ainsi que la rotule de poussée, par l’huile provenant de la boîte de vitesses.
Le pont arrière est constitué par une carcasse d’une seule pièce en tôle emboutie; le différentiel est à pignon cylindrique.
La suspension est assurée à l’avant et à l’arrière par des ressorts droits semi-elliptiques; les ressorts arrière passent sous la carcasse du pont.
La direction est du type à vis et écrou. Le frein au pied agit sur les quatre roues ; le frein à main agit sur les roues arrière seulement.
Le châssis se termine par un caisson arrière (fig. 18) qui forme support d’accumulateurs et porte-roue de secours ; tout en permettant un accès facile aux accumulateurs pour la vérifications et l’entretien, ce caisson donne au train arrière de la voiture toute la stabilité désirable.
Nous avons déjà indiqué, dans l’article précité, le soin avec lequel les Etablissements Voisin étudient leurs carrosseries; celles-ci sont profilées en vue de réduire la résistance à l’avance-ment, en même temps que la répartition des charges est réalisée de manière à procurer la meilleure tenue de route.
Disons enfin que les Etablissements Voisin ont acquis la licence exclusive en France pour la pose du servo-frein Dewandre sur les voitures à moteurs sans soupapes de toutes marques; nous avons déjà décrit en détail cet intéressant servo-frein dans le Génie Civil.